Les Français, le logement et le Covid: "vite, une pièce en plus !"

 

Les Français, le logement et le Covid: "vite, une pièce en plus !"

 

Par Eric Treguier le 08.12.2020 à 09h00 Abonnés Challenge






 

SERIE LOGEMENT POST-COVID 2/3 - Les urbains, coincés dans leurs appartements, ont redécouvert leur logement à la faveur du confinement et de la montée en puissance du télétravail. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils n’en sont pas totalement satisfaits… Des architectes étudient comment concevoir des appartements plus adaptables.

Les appartements post-Covid intègreront des "demi-bureaux"

 

De nouveaux concepts d'appartements sont en cours de création, qui intègrent davantage les besoins nouveaux nés des confinements: espaces extérieurs systématiques et aménagements intérieurs comme ces alcôves, sortes de demi-pièces en plus, qui peuvent servir de bureau pour les télétravailleurs.

Icade

 

Une étude réalisée par Ipsos pour l’association Qualitel, et publiée début octobre, confirme que les Français manquent d’espace au sein de leur logement et que le confinement a été, de ce point de vue, un révélateur. Sur l’ensemble de la France, en moyenne, explique Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos France, "les 25-34 ans vivent dans 91m². Mais ils aspirent à 111m², soit un écart considérable de 20m², la taille d’un studio". Pour les urbains, c’est bien pire. Et seulement 12% de Français qui vivent en studio ont bien vécu le confinement. Alors que trois quarts de ceux qui vivent dans plus de 120m² et la quasi-totalité de ceux qui habitent un logement avec un accès à l’extérieur ont traversé cette période sans en souffrir particulièrement. Sans surprise, les jeunes et les familles ont été ceux qui ont pâti le plus du manque de mètres carrés. Le recours accru au télétravail a aussi montré les limites du "home, sweet home" définitivement trop exigu: 34% des habitants estiment que leur logement n’est pas adapté et plus de 40% ne disposent même pas d’un espace dédié et sont obligés d’occuper la table du salon ou la chambre!

Très chères pièces en plus

 

Cette exiguïté est quasiment toujours subie, à cause des prix de l’immobilier. Au fil des ans, au cœur des villes, les familles ont dû sacrifier des mètres carrés à l’occasion de leur déménagement ou de l’achat d’un nouveau domicile. Comment se redonner de l’espace, comment gérer l’espace lorsqu’on travaille à domicile, sans augmenter les surfaces et sans faire exploser les budgets. C’est la délicate équation que tentent de résoudre de plus en plus de promoteurs, confrontés à des besoins nouveaux de la part des futurs acheteurs.

 

Combien pour une pièce en plus? Selon les données collectées pour Challenges par le site d’annonces Seloger, la barre est haute. A Paris, par exemple, l’acquisition d’un logement comprenant une pièce de plus que celui que l’on désire quitter, coûte, dans le cas du passage d’un deux pièces à un trois pièces, environ 230.000 euros de plus. Un deux-pièces se vend autour de 511.000 euros, un trois-pièces environ 742.000 euros. Soit une augmentation du budget initial de 45%. Ailleurs, compte tenu des prix très élevés de l’immobilier dans la capitale, c’est évidemment moins cher. Mais à Marseille, le passage d’un deux pièces (152.000 euros environ) à un trois pièces (201.000 euros) signifie un chèque alourdi de plus de 33%. C’est à peu près pareil à Nantes, Lyon, Rennes et Toulouse.

Un surcoût démesuré

 

C’est d’autant plus compliqué que, compte tenu de la structure du parc, le surcoût n’est pas identique dès lors qu’on cherche à augmenter la taille d’un appartement déjà grand: passer du XL au XXL a un coût démesuré… dans certaines villes. Ainsi vendre son quatre pièces pour acquérir un cinq pièces représente un effort colossal dans certaines villes. Un appartement de cinq pièces va en effet coûter, sur la base de chiffres collectés il y a un an mais qui reste d'actualité, plus de 2,2 millions à Paris, un million à Nice, 900.000 euros à Lyon, 600.000 euros à Toulouse, 550.000 euros à Strasbourg et 450.000 euros à Rennes.

 

Compte tenu des prix moyens d’un appartement plus petit d’une pièce, d’un quatre pièces donc, le surcoût sera d’un million d’euros à Paris (pour une seule pièce en plus!), 400.000 euros à Nice et à Lyon, un peu moins de 300.000 euros à Toulouse, 220.000 euros à Strasbourg et "seulement" (!) de 150.000 euros à Rennes. Mais dans la capitale bretonne où le prix de l’immobilier est d’environ 3.000 euros/m², cela signifie que l’achat d’une pièce supplémentaire (pour une surface globale de l’appartement accrue d’une vingtaine de mètres carrés) revient à plus de 6.000 euros du mètre. La chambre du petit ou le bureau des parents se paie donc à Rennes deux fois plus cher que le mètre carré habitable ordinaire. Et que dire de ce qui se passe dans la capitale, où le mètre carré supplémentaire est trois à quatre fois plus cher que celui du mètre carré ordinaire?

Pousser les murs

 

Difficile d’agrandir un appartement existant. Mais depuis longtemps, les concepteurs de nouveaux logements se penchent sur la question. Leur feuille de route est la suivante: "comment rendre les appartements futurs plus ouverts, plus modulables et plus adaptés à des changements de mode de vie de leurs habitants". Certes, pour eux non plus, il n’est pas possible de pousser les murs. Quoique… Challenges est allé fouiller dans  les cartons de Nicolas Laisné, un architecte installé à Montreuil (Seine-Saint-Denis) et qui a réalisé des immeubles récompensés par plusieurs prix, comme "L’Arbre blanc", à Montpellier, qui offre de larges balcons comme greffés à un tronc commun.

 

L’architecte travaille aujourd’hui à un nouveau concept avec le promoteur Icade, pour créer un modèle reproductible qui permette de concilier le vivre ensemble, l’écologie et l’adaptabilité. Avec, c’est sa signature, de très larges balcons, mais pas seulement… "L’espace économisé par la diminution des parkings nous permet de donner plus d’importance aux espaces mutualisés, comme les rez-de-chaussée, les toits, sur lesquels on peut créer des espaces personnels", explique Nicolas Laisné, qui ajoute "nous avons aussi chercher à identifier les espaces dans le logements qui peuvent être utilisés pour le télétravail et qui ont d’autres fonctions aujourd’hui, comme par exemple, certaines entrées d’appartements. Nous concevons aussi des chambres un peu plus grandes, avec des meubles adaptés, des cloisons transparentes, sans augmenter la surface globale de l’appartement."

Le retour de l’alcôve

 

C’est le grand retour de l’alcôve, dans la chambre mais surtout dans le salon. Elle permet, grâce à des cloisons amovibles, un mobilier spécifique, d’agrandir l’espace ou au contraire de l’isoler pour le transformer en chambre à l’occasion du passage d’un ami ou en bureau, en cas de télétravail. "On avait une approche qui s’attachait trop au prix au mètre carré habitable, reconnaît Emmanuel Desmazières, directeur général d’Icade Promotion, mais on s’est aperçu qu’en reprenant la conception depuis le début, on pouvait mieux adapter les appartements aux aspirations de leurs habitants. Et quand on arrive avec des logements qui offrent une terrasse aménagée de 20m² et qui est quasiment une pièce en plus, on voit bien que c’est une valeur qui est parfaitement perçue par le client. Et comme on intègre cela dès la conception, on arrive à construire à prix constant…"

 

Source :   Magazine Challenge

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